Archives mensuelles : janvier 2016

Une marche dans Kolkata

 

Nous sommes en Inde. À Kolkata, pour être plus précis.

Aujourd’hui, nous allons au marché aux fleurs, à pied et vous venez avec nous.

Robert a programmé le trajet sur son IPhone à partir de l’application Google Maps. Une fois le trajet enregistré, il peut le consulter hors ligne. Le GPS de l’appareil indique notre situation par un petit point bleu qui nous suit dans nos déplacements. Nous connaissons toujours notre position. Ne vous inquiétez pas, impossible de se perdre. Pas longtemps du moins.

Il fait froid aujourd’hui, quelques degrés plus froid que d’habitude à cette date, selon les habitants de Kolkata. Les femmes se promènent avec de grands châles épais enroulés autour de leurs épaules, par dessus leur sari. Comme d’habitude, les couleurs s’harmonisent parfaitement, peu importe la simplicité du sari. Les hommes portent un manteau et un foulard autour du cou, certains l’ont enroulé autour de leur tête. C’est l’hiver. Par contre, le soleil se montre le bout du nez en cette fin d’avant-midi et devrait nous réchauffer un peu. Nous portons nos chandails les plus chauds. Tout ira bien.

Des itinérants dorment encore, recroquevillés sous une couverture d’une couleur douteuse, couchés à même le sol ou sur des cartons étendus sur le trottoir. Certains, se sont recouverts entièrement et il est bien difficile d’imaginer un être humain blotti sous cet amas de couvertures. Les passants circulent juste à côté sans même jeter un regard. Quant à nous, nous évitons aussi de les regarder, leur laissant ce qui leur reste d’intimité. Le bruit de la circulation environnante et le passage des gens ne semblent pas les déranger. Ils sont habitués. Ils n’ont pas le choix.

La place autour du nouveau marché est curieusement tranquille. Habituellement les rues environnantes sont envahies par les marchands et les promeneurs. Le sol est entièrement couvert de marchandises de toutes les sortes. On peut trouver presque tout ici mais il est extrêmement difficile d’y circuler. Nous évitons habituellement sinon c’est la bousculade assurée ou des sollicitations qui ne finissent plus. Mais aujourd’hui, c’est pratiquement désert. Un homme nous apprend que c’est l’anniversaire d’un militaire important, il a milité pour l’indépendance du pays, en même temps que Gandhi. Plusieurs personnes ont congé et certains commerces sont fermés. En effet, les rues nous apparaissent plus calmes. Mais elles ne sont pas désertes pour autant.

Aussitôt dépassé le marché, un petit carrefour s’ouvre devant nous. Un immense marché à ciel ouvert apparaît, encadré par de hautes maisons. Le genre de marché qui s’installe le temps de le dire sur une espace vide et propose des vêtements, des saris et des châles de toutes les sortes. Les marchands arrivent avec de grandes boîtes le matin et repartent avec leur matériel invendu en fin de journée. C’est le festival des couleurs, des textures et des tissus chatoyants. La place est en pleine effervescence avec les bruits de conversations et les pétarades des motos qui se frayent un chemin à coup de klaxon. Quelle ambiance! Soudain, des femmes avec des bébés dans leurs bras nous abordent pour demander de l’argent, de la nourriture ou du lait. Elles sont insistantes, très insistantes. Une d’entre elles tire sur mon chandail alors que d’autres sollicitent mon attention en criant: « Auntie, auntie! » en espérant que je me retourne. Je résiste en sachant que certaines d’entre elles font partie d’un réseau, que d’autres auraient d’autres solutions que la rue. La présence du marché et d’acheteurs éventuels les a attirés. On nous dit de ne pas leur donner d’argent car cela les maintient dans la rue. J’ai questionné des gens du pays à plusieurs reprises et la réponse est toujours la même. Ne pas donner sauf peut-être aux personnes handicapées ou aux femmes très âgées. Même à eux, c’est impossible de donner à tous. Il y en a tellement! C’est difficile de ne pas se laisser attendrir, surtout quand le bébé nous regarde avec ses grands yeux bruns immensément brillants, les vêtements et les cheveux sales. Les plus vieux ne vont pas à l’école…quelle vie les attend? Un Indien parle aux femmes dans leur langue et à ses gestes je crois qu’il leur demande de nous laisser passer. Venez!

Secoués? Nous le sommes aussi. Je ne me suis jamais habituée. Malgré tous ces mois passés en Inde, j’ai plus de questions que de réponses. À quel soutien ces gens ont-il accès? Malgré toutes mes recherches, les réponses sont nébuleuses. J’ai entendu dire qu’à certains endroits, il y a distribution de nourriture et que plusieurs ONG font du travail sur le terrain. Pour le reste, je n’en sais trop rien et cela m’attriste, comment pouvons nous aider?

Continuons notre chemin. Robert vient de consulter le trajet sur son IPhone, nous sommes sur la bonne route. Mais il faut traverser la rue. De l’autre côté, des motos sont stationnées en rang serré sur le trottoir et il est bien difficile de se frayer un chemin. Elles sont placées si près l’une de l’autre qu’un faux mouvement qui ferait tomber une moto ferait tomber toutes les autres, comme un jeu de domino! C’est un peu le scénario qui m’inquiète à chaque fois que je dois passer entre des motos stationnées en ligne sur le trottoir. Vous connaissez ma maladresse…
Une musique se fait entendre. Allons voir! La musique se fait de plus en plus forte et le chanteur a une jolie voix. Des chaises sont placées devant une estrade.Des enfants se retournent, je leur souris et ils m’envoient la main. D’un signe, ils proposent de nous asseoir. Et bien, allons-y! Robert adore cette musique et le joueur de tabla est excellent. De temps en temps, quelqu’un réalise que nous sommes là et donne un coup de coude à son voisin en nous montrant du menton. Le sourire arrive peu après quand je leur adresse un large sourire. Nous sommes les seuls blancs depuis un bon moment déjà. Ne soyez pas intimidés. Regardez plutôt autour de nous. C’est tout un spectacle d’être assis à ce carrefour avec de grands édifices grisâtres en arrière-plan, le passage incessant des autobus d’un côté, et de l’autre, des livreurs avec un lourd chargement sur la tête. Ce n’est pas tout le monde qui est en congé. Le soleil commence à se faire plus chaud et c’est plus confortable. Le spectacle terminé, Robert serre la main du chanteur et nous reprenons notre route. Suivons-le!

Sur notre droite, un homme et son fils font leur toilette à un point d’eau situé en bordure du trottoir. Bien savonnés, il sont sur le point de se rincer. À l’eau froide. En silence, concentrés sur leur tâche, les yeux baissés. Nous détournons le regard. Ces points d’eau sont pour tous. Les cuisiniers des échoppes sur le trottoir s’en servent pour laver leur vaisselle, sur le côté de la rue. D’autres viennent faire une provision d’eau. Plus loin, des mères lavent leur enfant, une autre nettoie ses pieds et ses sandales de plastique. Cette eau n’est accessible qu’à certaines heures de la journée. Mieux vaut en profiter.

À un autre point d’eau, une femme fait ses ablutions en se cachant avec son sari alors que des hommes déchargent patiemment un camion de sable à l’aide d’une pelle. Ils ne s’occupent pas de la femme même s’ils ont dû se stationner à un mètre d’elle. Quant à la femme, elle continue à se savonner, bien concentrée. Passons notre chemin.

Quel est ce bruit? C’est le tramway qui avance lentement. Il circule dans des quartiers précis et à certaines heures seulement, selon la circulation. Il est bondé. Les passants, les motos et les autos n’ont pas le choix de lui laisser le passage. Sa route est toute tracée, il ne peut en dévier. Il y a de plus en plus de gens dans les rues, la circulation est plus dense, c’est difficile de traverser. Tenons-nous ensemble. Pour les intersections plus importantes, mieux vaut attendre d’être plusieurs avant de mettre le pied dans la rue. Le traffic n’a donc pas le choix de s’arrêter. Mais ça va, ce n’est pas long avant qu’un petit groupe se forme il y a tellement de monde! Attendons un peu.

Vous entendez des bruits de clochettes et des bêlements? Vous ne rêvez pas. Des moutons défilent devant nous. Suivies de leur gardien. En bordure de la rue, entre les vélos et les rickshaws. Un troupeau de moutons dans les rues de Kolkata, en plein après-midi. Je n’ai aucune idée d’où ils viennent, ni où ils vont. Mais je peux vous assurer que cela arrive tous les jours.

Robert consulte de nouveau notre trajet sur son IPhone. Il se met en retrait pour ne pas trop attirer l’attention et je me place devant lui. C’est une précaution que nous prenons partout même à Kolkata, où nous nous sentons en sécurité sur la rue. En plein après-midi particulièrement. Un calme règne malgré le bruit des autos et des motos qui ne cessent de klaxonner. Tout près, une petite famille est assise sur le trottoir, au soleil. Des hommes, des femmes et des enfants dans un arc-en-ciel de couleurs. Un des enfants semble raconter quelque chose et fait de grands gestes. Une des femmes le regarde en souriant, ses yeux pleins d’amour et de fierté. Elle fait des signes complices à l’homme devant elle. L’amour familial à son meilleur.

Des hommes filiformes nous abordent. Ils nous offrent de monter dans leur rickshaw. Ils le tirent avec leurs bras, marchant souvent pieds nus. Robert dit qu’il a y eu de grandes discussions sur leur sort à Kolkata. La décision a été prise de ne plus accepter de nouveaux « pulled rickshaw » mais de permettre seulement à ceux qui avaient déjà leur permis de continuer car c’est leur unique moyen de survie. Jusqu’ici j’ai toujours refusé de monter. Je ne m’en sens pas capable. Pourtant, me rappelle Robert, c’est leur gagne-pain. Nous voyons régulièrement des personnes utiliser leurs services et pas nécessairement des touristes. Et vous? Le feriez-vous? Continuons notre route.

Sur la gauche un homme se fait raser, assis sur un petit banc sur le bord du trottoir. Presque au coin de la rue. Les yeux fermés, il lève le menton avec confiance afin que son barbier puisse le raser avec plus de facilité. Les gestes de celui-ci sont lents et précis. Un moment presque intime entre celui qui a besoin d’un service et celui qui fait son travail de son mieux. Le lieu, les gens qui passent et les bruits environnants ne semblent pas avoir d’importance. Il fait bon sous le soleil d’après-midi.

De chaque côté de la rue des commerces se succèdent. Sur la droite, ceux des tailleurs de pierre. Ils travaillent assis par terre, couverts de poussière, bien concentrés sur leur œuvre. Ils ont beaucoup de talent et leur travail est raffiné. De l’autre côté de la rue, des marchands de chaudrons et de contenants de métal de toutes les sortes attendent leurs clients. Plusieurs d’entre eux lisent leur journal, bien tranquillement. Je m’arrête devant un magasin de paniers et je prends une photo. Robert me sourit, il connaît ma passion pour la vannerie. Un homme est assis devant le commerce voisin. Du regard et d’un signe vers mon appareil photo, je lui demande la permission de le photographier. Il acquiesce d’un hochement de tête et prend la pose. Je le remercie et lui montre la photo. Il sourit. La photo lui plaît. Un peu plus loin des chiens dorment sur le trottoir, étendus au soleil. Rien ne les dérange et ne bougent pas d’un poil à notre passage.

Nous marchons encore, puis Robert regarde de nouveau notre trajet. À l’expression de son visage, je réalise que quelques chose ne va pas. Nous marchons dans la mauvaise direction depuis plusieurs minutes. Intrigués par nos observations, nous avons changé de rue. Je ris…Ce n’est pas grave. Nous arriverons au marché de fleurs un peu plus tard et par un autre chemin. C’est tout.

Le quartier semble de plus en plus pauvre, les rues plus étroites. Il y a moins de commerces sauf des marchands de fruits le long du trottoir ou un peu de cuisine de rue. Nous traversons une voie ferrée et j’arrête, surprise. Un bidonville construit le long de la voie. Tout près. Très près du passage du train. Des maisons en tôle et en carton. Robert prend des photos mais j’en suis incapable…tant de pauvreté. À l’infini.

C’est le visage que nous montre Kolkata. Ces visages de la rue. Tous ces autres passants que nous avons rencontrés ont probablement une vie plus privée, sûrement plus douce. Mais celle-là, nous n’allons que la deviner. Comme un bel appartement derrière une porte entrebâillée.

Nous approchons de la rivière et des ghats. Robert me montre le pont Howrah tout près. Le marché aux fleurs commence sous ce pont. Nous sommes presque à destination, ne vous inquiétez pas. Voyez vous, sans cette erreur de trajet, nous serions arrivés de l’autre côté et nous n’aurions jamais vu le bidonville.

En approchant du pont, des bruits de toutes sortes deviennent de plus en plus intenses et nous apercevons les premiers marchands. Entourés d’un va et vient continu, très dense. J’ai lu que ce marché poursuit ses opérations jour et nuit, que ses fleurs sont distribuées partout au pays. Je le crois volontiers en observant ces hommes qui transportent de grands paniers de fleurs sur leurs têtes. Certains montent l’escalier vers le pont, toujours avec leur chargement sur leur tête. Ils crient quand quelqu’un se place sur leur route et les empêche de passer. Leur charge doit être lourde! D’autres descendent ce même escalier avec d’immenses sacs sur leur tête. Ils les déposent avec fracas aux pieds du marchand destinataire.

Une discussion s’entreprend sur notre droite. Deux femmes crient. L’une fait un signe de main à la vendeuse et fait mine de quitter. Elles se crient à distance. N’ayez pas peur…elles négocient, elles négocient serré mais c’est tout. Un camion se fraye un chemin avec difficulté. Nous devrions aller sur le côté, entre les marchands pour lui laisser de la place.

Je veux monter sur le pont pour voir la scène de plus haut. Vous venez? Oui, je sais, monter l’escalier avec tous ces gens n’est pas une tâche facile mais cela ira. Nous sommes au bout du monde, il faut en profiter. C’est beau non! Regardez! Le marché est si grand vu d’en haut! Derrière nous, un flot incessant de personnes avance sur le trottoir du pont, passant d’une rive à l’autre. Nous sommes en fin d’après-midi et les gens rentrent chez eux. Il est temps pour nous de rentrer aussi car la noirceur arrivera bientôt et nous serons mieux à l’hôtel.

Prenons un taxi, nous avons assez marché aujourd’hui. Les bruits continuels, la circulation dense, la foule, c’est fatigant au début. Et Robert veut aller déguster un bon thali dans le restaurant où nous sommes allés l’autre soir sur Park Street. Venez, vous allez aimer.

Il fait presque nuit lorsque nous arrivons finalement sur Sudder Street, la rue de notre hôtel. Les gens de la rue ont commencé à faire des feux sur le trottoir. Ils se tiennent debout, les mains tendues au dessus des flammes pour se réchauffer les mains. Les chauffeurs de taxi ont mis leur tuque et leur manteau. Les itinérants portent leur couverture sur le dos. La nuit sera fraîche.

Kampot

Après presque trois semaines au Cambodge, nous avons compris que les beautés de ce pays ne sont pas nécessairement où l’on s’attend. Il nous reste plus d’une semaine avant de reprendre l’avion et l’exploration des régions du sud reste à faire. Même si les guides de voyages ne donnent pas des commentaires élogieux sur cette région, nous réservons un hôtel pour quelques jours à Kampot, quitte à allonger notre séjour si la ville est bien. Sinon, un retour anticipé à Phnom Penh demeure une option.

Lors de la recherche d’un hôtel, le Blue Bouddha attire notre attention. Un peu excentré par rapport au centre de la ville, mais puisque Kampot n’est pas très grande, cela ne devrait pas poser de problème. Les commentaires sont positifs et nous réservons quelques nuitées.

L’hôtel est effectivement très, très propre. Accueillant malgré sa grande simplicité. Et surprise, notre hôte parle avec l’accent québécois. Normal, car il vient de la Rive Sud de Montréal!

Comme d’habitude, notre premier réflexe est de louer les services d’un chauffeur de tuk tuk qui nous fera découvrir les environs de Kampot.  À notre rythme. C’est à dire…lentement.

Le chaud soleil, la montagne et une grotte ancienne, la préparation des marais salants pour la saison qui commence sous peu, la plantation de poivre Starling Farm, le lac secret et une longue ballade dans la merveilleuse campagne autour de Kampot. Quelle belle journée!

Nous profitons de la visite de la plantation de poivre pour acheter ce fameux poivre qui fait la réputation de la région. Le poivre frais parfume un plat comme rien d’autre et notre réserve en provenance de la Malaisie est épuisée. Celui de Kampot est certifié biologique et nous avons l’assurance qu’il provient bien de la région. C’est l’occasion idéale. Au marché il y a bien du poivre vendu sous l’appellation « poivre de Kampot » alors qu’il provient principalement du Vietnam. Il est certainement excellent lui aussi mais pas de même qualité alors qu’il est vendu au même prix!

C’est vrai qu’il y a peu à faire à Kampot sauf prendre le temps de vivre. Tout est plus calme ici, la circulation vraiment moins dense et les rues plus larges. Les déplacements à pied s’effectuent plus facilement et les longues marches deviennent possibles. Les couchers de soleil sont mémorables, contemplés confortablement assis sur un banc au bord de la rivière. Un beau petit village pour se reposer.

Notre hôtel n’offre pas encore les services de restauration, ses opérations n’ayant débuté que depuis six mois. Il faut donc se déplacer pour les repas. C’est parfois difficile de trouver un resto qui nous convienne même si les choix ne manquent pas. Les heures d’ouverture et les journées de congé varient d’un restaurant à l’autre alors il faut bien s’organiser! Certains endroits sont toujours bondés. Pour les autres…nous n’osons pas. Ils ne paient pas de mine. La cuisine de rue? Hors de question. Pour confirmer nos appréhensions, lors de notre départ de l’hôtel, un des employés revient d’une hospitalisation de deux jours pour un empoisonnement alimentaire, la prudence reste de mise.

L’hôtel offre des services de buanderie par le biais d’un commerçant de la ville. Un matin, un homme rapporte nos vêtements propres juste au moment où nous passons devant la réception de l’hôtel.  Il nous demande de valider ceux qu’il ramène. Deux morceaux semblent ne pas nous appartenir. Nous confirmons. Deux vêtements manquent donc à l’appel. Parti au pas de course, l’homme revient avec un sac de vêtements en vrac puis nous demande de lui indiquer quels sont les nôtres. Imaginez la scène: Robert et moi, cherchant nos possessions parmi t-shirts, shorts, bas et linge de corps, le tout pêle-mêle. Mal à l’aise, n’osant trop fouiller dans un sac de vêtements qui ne nous appartiennent pas. L’homme prend le sac et amorce le geste de le vider par terre. Robert l’arrête juste à temps. « No! Not on the floor! » Notre hôtelière s’insurge et explique à l’homme de ne pas mettre des vêtements propres par terre au beau milieu de la réception! Outrée, elle déclare que c’est un mauvais service et oblige le commerçant remettre l’argent que nous lui avons versé. Je ne suis pas d’accord car les vêtements sont effectivement propres et ils sentent bon. Je lui en aurais payé la moitié au moins mais je n’ose plus contredire l’hôtelière. C’est elle qui devra continuer à faire des affaires avec ce fournisseur, pas moi. Je ne veux pas qu’elle fasse mauvaise figure et de plus, je vois bien que son idée est faite. Nous finissons par trouver les morceaux manquants et l’homme nous quitte. L’hôtelière est furieuse et nous sommes morts de rire! C’est la première fois qu’une telle chose nous arrive. Mais elle a raison, ce n’est pas acceptable.

Avant de repartir vers Phnom Penh, nous effectuons une petite virée à Kep, une ville située au bord de la mer à 40 minutes de Kampot. Un chauffeur de tuk tuk sera notre guide, il est originaire de la ville, quelle chance! Premier arrêt, le Parc national de Kep aménagé dans la montagne. Nous y restons presque deux heures trente à marcher le long des sentiers avant de rebrousser chemin même si nous aurions bien continué notre exploration. Mais il faut repartir si nous voulons visiter le reste de la ville.


Lorsque la faim se fait sentir, notre chauffeur propose un petit resto sur le bord de la mer. Le choix du repas n’est pas bien difficile à faire…Kep est réputée pour son crabe au poivre vert. En attendant l’arrivée du repas, nous observons la vie autour de nous. Des femmes s’affairent auprès de cages immergées non loin de la rive, j’imagine qu’elles contiennent des crabes. Des enfants s’amusent à faire voler leur cerf-volant… Il fait soleil et une brise vient de la mer. Notre crabe est servi. Quel délice…

Après le repas, nous marchons le long de la plage et le temps dégagé permet de voir l’île au Lapin, située juste en face de la ville.

En fin d’après-midi, nous grimpons jusqu’à un temple un peu isolé, accroché au flanc de la montagne. Le temple est paisible, la vue est superbe et le coucher de soleil à couper le souffle. Il semblerait qu’il est possible d’apercevoir au loin l’Île de Phú Quoc au Vietnam. Nous y avons passé quelques jours avant de traverser au Cambodge. Plusieurs îles se découpent à l’horizon et il est bien difficile d’identifier celle qui nous intéresse. Cela n’a pas vraiment d’importance, nous profitons simplement de cette belle nature.  La vue et le coucher de soleil sont splendides et valent bien la montée.

Pour terminer, nous traversons un village de pêcheurs et nous rentrons alors que le jour s’est couché. Une autre belle journée…

C’est avec un peu de regret que nous quittons Kampot, une ville parfaite pour se reposer. Mais Phnom Penh nous attend, nous prévoyons terminer notre séjour au Cambodge par quelques nuitées à l’Hotel Anise. Un véritable havre de paix.

Kompong Thom

Qu’est-ce qui nous amène dans ce petit village situé à mi-chemin entre Siem Reap et Phnom Penh? Notre insatiable intérêt pour les sites archéologiques bien sûr, jumelé à notre désir de connaître davantage la vie dans un petit village. Le Cambodge nous intrigue et ce n’est pas en suivant uniquement les circuits touristiques que nous en apprendrons plus.

Le choix d’un hôtel nous a pas mal donné une idée de ce qui nous attend. Un patelin avec peu de services pour les touristes. Mais c’est de bonne guerre. Au fil des jours nous comprenons que le Cambodge a peu de sites d’intérêts à offrir et qu’un voyageur peut rapidement en faire le tour. Ce pays a d’autres richesses qu’il faut prendre le temps de découvrir. Nous avons le temps et surtout, le désir de comprendre le mode  de vie de ce petit pays. Il se peut que le confort ne soit pas toujours au rendez-vous!

Notre hôtelière parle le français et se fait un plaisir de nous répondre dans notre langue. Par contre, pour apprendre un peu plus sur la vie Kompong Thom, ce n’est pas elle qui m’aidera. Elle demeure très formelle et peu présente. Elle nous salue poliment, avec un grand sourire et c’est tout.

Aussitôt nos bagages déposés dans notre chambre, nous partons à la recherche d’un chauffeur de tuk tuk qui voudra bien nous amener au Sambor Pre Kuk, le site archéologique qui nous a attiré à Kampong Thom. Les négociations terminées, nous allons prendre une bouchée au seul restaurant recommandable de la ville. Ou presque…

Le restaurant est immense pour une si petite ville. Ce n’est pas surprenant, tous les autobus s’y arrêtent en allant soit vers Siem Reap, soit vers la région de Phnom Penh ou encore plus loin vers le sud. La nourriture y est assez bonne, le service assez courtois mais la propreté laisse à désirer. Mais nous avons appris avec le temps à demander que notre table soit nettoyée. Avec le sourire, cela passe mieux. Les Cambodgiens n’aiment pas être pris en défaut, c’est normal et nous sommes des invités dans leur pays.

Sur le chemin du retour vers notre hôtel, un chauffeur de tuk tuk nous aborde poliment, dans un anglais impeccable. Il propose une visite au site archéologique pour le lendemain. Il est très réservé mais ses yeux s’éteignent lorsque je lui explique que nous avons déjà notre chauffeur. Il est plus de dix heures du soir. Cet homme n’a pas de travail pour le lendemain, son regard déçu restera avec moi longtemps.

Réveillés tôt le lendemain, nous partons pour Sambor Pre Kuk après le petit déjeuner pris au même restaurant que la veille. Je reconnais certains serveurs de la soirée précédente, ils ont l’air un peu endormis et je me demande jusqu’à quelle heure ils ont travaillé. Les heures de travail sont longues ici au Cambodge et parfois le salaire n’est pas au rendez-vous.

Encore une fois, il fait beau et chaud. Nous avons environ une heure de route devant nous. Une belle occasion de découvrir la campagne. Le sourire aux lèvres nous savourons notre voyage.

Sambor Pre Kuk est très ancien, très étendu et disséminé dans la verdure. Nous désirons prendre un guide mais personne n’est libre. Juste au moment où nous débutons notre visite par nous même, notre chauffeur de tuk tuk nous appelle. Quelqu’un vient de se libérer.

Et la visite commence. Pendant presque trois heures, notre guide nous entretient de cette culture Pré-Ankorienne qui date de l’époque du 7e siècle au 9e siècle, jusqu’à ce que le pouvoir soit transféré à Angkor avec l’arrivée d’un nouveau roi. Le site a été revisité par la suite et de nouvelles constructions se sont ajoutées. Par contre, les techniques de construction sont différentes et ces édifices supportent moins bien le passage du temps. Les styles diffèrent et les dieux aussi. Au Cambodge, le Bouddhisme s’est ajouté à l’Hindouisme et il n’est pas rare que les deux religions se retrouvent dans les mêmes lieux.

C’est pour nous un véritable bonheur de découvrir ces petits édifices camouflés dans une belle verdure. Les arbres nous protègent du soleil et la visite se déroule confortablement.

D’entrée de jeu, nous réalisons que le site a été bombardé et que les édifices portent des stigmates de ces batailles. Des Vietnamiens se seraient réfugiés à travers les ruines et des bombardements auraient suivi pour les déloger. Encore une triste page d’histoire pour cette nation qui est considérée comme ayant été la plus bombardée de l’histoire. Jusqu’à maintenant…

Notre guide prend le temps de nous expliquer les enjeux qui menacent les ruines. La déforestation, les gens qui viennent couper les arbres le soir où la nuit,  d’autres qui viennent creuser pour trouver des artéfacts. Sambor Pre Kuk est immense et seulement une partie  a été explorée. Des travaux de réfection sont toujours en cours, parrainés par des pays amis. La cité est en attente d’être reconnu par l’UNESCO. Le processus sera peut-être terminé d’ici deux ans. Est-ce que cela sera suffisant pour protéger ce patrimoine laissé aux habitants de ce pays? Quelles en seront les conséquences pour le personnel déjà en place? Qui sait.

Nous avons aussi une belle discussion avec notre guide au sujet de la vie à la campagne et les enjeux concernant la survie de son peuple. L’importance de l’éducation, son regret de ne pas avoir pu pousser ses études comme il l’aurait souhaité, sa reconnaissance envers ceux qui lui ont donné la chance d’étudier et son désir de transmettre ses connaissances aux jeunes de sa communauté. Il donne de son temps à des élèves afin de leur enseigner l’anglais.

Même si la majorité des gens n’en parlent pas ou ne font que le mentionner, nous constatons que ce pays a été durement touché par les guerres. Ce peuple est travaillant, la population jeune et dynamique. Nous leur souhaitons des jours meilleurs.

Nous remercions chaleureusement notre guide, la visite a été plus longue que prévu, il a été très généreux de son temps. Un petit pourboire lui témoigne de notre gratitude.

Notre chauffeur de tuk tuk nous reçoit avec un « Je vous attends depuis trois heures!  » Bien sûr! Nous lui avions dit la veille, cela faisait partie de la négociation du prix. Mais je crois qu’il ne nous avait pas crus…C’est bien mal connaître notre passion!

Sur le chemin du retour, notre chauffeur s’arrête à une intersection: « Voulez-vous prendre les routes de campagne? » Sans aucune hésitation, nous acceptons. Une heure pour nous promener à travers les petits hameaux, les rizières et les cultures de lotus! Quel bonheur! La campagne est beaucoup plus propre que Kampong Thom et ses alentours. Il existe bien de petits amoncellements de détritus près de certaines habitations, mais ce n’est pas généralisé.

Nous avons appris lors de la discussion avec notre guide du matin que plusieurs membres de la population ont de la difficulté à se nourrir tous les jours. Même lui doit compléter ses revenus par un travail occasionnel dans une rizière. L’état de ses mains nous le confirme. Une chaude lutte non seulement pour nourrir sa famille mais aussi pour éduquer leur enfant et peut-être, de compléter ses propres études. Ce que nous lui souhaitons de tout coeur. C’est à lui et à tous les autres qui travaillent si fort que nos pensées vont en traversant cette verdoyante nature. C’est aussi en souhaitant que l’homme réalise à quel point cette nature est merveilleuse mais qu’il la met à risque en la fragilisant avec ses détritus, en polluant ses cours d’eau et en en décimant ses forêts pour cuisiner. Ou tout simplement pour la vente de son bois précieux.

Nous revenons à notre hôtel, pleins de poussière mais le sourire aux lèvres. Kampong Thom vaut le détour. Nous repartons demain pour Phnom Penh.

Battambang

Battambang, la deuxième plus grande ville au Cambodge.

Nous arrivons par bateau, une randonnée de presque 8 heures dans une embarcation chargée plus que la raison ne le permet. Des dizaines de personnes juchées sur le toit, avec leurs bagages. Sous le soleil brûlant du Cambodge, sans gilet de sauvetage. Heureusement, presque tout le trajet s’effectue dans des canaux peu profonds. Le seul risque est de tomber dans une eau extrêmement polluée et de retrouver nos appareils électroniques dans la boue et l’eau sale. Rien de bien réjouissant. Un voyage où l’inconfort des bancs de bois et la monotonie prennent presque toute la place.

Bien sûr, nous  traversons des villages flottants sur le Tonlé Sap, ce qui demeure très intéressant. Nous observons alors en direct comment se font les transports d’un village à l’autre. En bateau-taxi. Cette fois-ci en utilisant notre rafiot, déjà trop chargé. Une plus petite embarcation amène le passager vers la plus grande. Même stratégie lorsque la destination est atteinte. Le voyageur repart dans une petite barque qui l’attend. Je suis impressionnée de l’agilité de ces passagers qui transfèrent d’une embarcation à l’autre, les bagages à la main sans même l’ombre d’une hésitation.

Au fil des heures, nous observons les changements dans le mode de vie des habitants des rives des canaux menant vers Battambang. Tout d’abord des villages flottants avec leurs épiceries, leurs écoles et leurs maisons, flottant si près du niveau de l’eau que la moindre vague les fait ballotter. Plus loin, des agglomérations de maisons sur pilotis apparaissent, bâties sur les bords de la rivière. Nous naviguons plus bas que le rivage et il m’est impossible de voir les terres avoisinantes, plusieurs mètres plus haut même si parfois la présence de grandes rizières se laisse deviner.

En approchant de Battambang, nous longeons une série de refuges de fortune. Des bâches accrochées sur des supports de bois pour la protection du soleil. C’est tout. Des gens s’affairent autour de leur abri, leur quotidien se passe à l’extérieur. Des enfants jouent ou se baignent à une heure où ils devraient être à l’école…je n’ai pas pris de photo. J’en ai été incapable. Cela fait partie des images que vous ne verrez pas. La pauvreté ne se photographie pas. Par respect.

Nous n’avions pas besoin de cette ballade pour comprendre davantage le Cambodge et je ne la recommande à personne. Et sachez que vous traverseriez une section du Tonlé Sap sans protection et que le bateau serait trop chargé, l’appât du gain des opérateurs défiant toute raison.

Battambang est une ville tranquille avec peu d’attractions. C’est la campagne qui est intéressante. Et c’est ce que nous cherchons à organiser lorsqu’une courte publicité retient notre attention.

Parfois il n’en tient qu’à un entrefilet pour nous mener vers l’aventure. Le Butterflytour.asia en est un bon exemple. Une agence qui offre des tours en vélo hors des sentiers battus? Faire le tour des villages en pédalant, visiter des petites entreprises et discuter avec les gens du pays accompagnés d’un guide qui parle anglais? Intéressant!

Cette organisation embauche des étudiants qui désirent parfaire leur anglais. Aider des jeunes à payer leurs études et apprendre davantage sur le Cambodge…cela nous convient.

Je dois vous avouer tout de suite que la ballade en vélo m’inquiète un peu. Je ne suis pas très habile sur un vélo même si j’en ai fait pas mal il y a plusieurs années. Déjà au Canada je ne suis pas très à l’aise dans une circulation dense. Ici, il y a moins de voitures mais il y a beaucoup de motos et de vélos. Une discussion avec le jeune homme qui nous reçoit à l’agence me rassure, une courte section du trajet se fera dans la ville mais aussitôt que nous atteindrons la campagne, nous suivrons des routes secondaires. Des enfants le font alors pourquoi pas moi? Et le trajet nous intéresse beaucoup. Nous prenons un rendez-vous pour le lendemain après-midi. Un tuk tuk nous prendra à notre hôtel. Une sortie parfaite pour le jour de Noël.

À notre arrivée, notre guide et sa stagiaire précisent l’ordre du jour et nous ajustons nos vélos. Je m’attends à me sentir insécure pour les premières minutes en vélo mais que tout devrait rentrer dans l’ordre aussitôt habituée à ma monture. La circulation m’inquiète plus…mais pas trop quand même. Les casques de vélo sont fournis ainsi que de l’eau, indispensable sous le chaud soleil d’après-midi..

La sortie de la ville est un peu ardue pour moi mais notre guide est extrêmement gentil et me rend la tâche facile. Les premiers kilomètres se font facilement et la chaleur se tolère bien à vélo. Nous passons à travers de petits villages mais je dois avouer que je n’ai pas trop le temps de regarder, toute mon attention est centrée sur la conduite du vélo. Les salutations fusent de partout. Mon amoureux adore le vélo et son sourire ne trompe pas. C’est Noël et la journée est belle.

Au premier arrêt, une petite entreprise de fabrication de papier de riz destiné à cuisiner des rouleaux de printemps. Les membres d’une famille nous attendent pour nous montrer leur savoir-faire.

Mon amoureux en profite pour troquer son casque de sécurité pour son bonnet de père Noël. Avec sa barbe blanche il a vraiment la tête de l’emploi et il s’amuse!

Une des femmes m’offre de participer au processus et de placer les feuilles de riz sur une grille qui sera ensuite exposée au soleil pour le séchage. Après quelques essais j’y arrive sans mal. Il me reste à prendre de la vitesse. Notre guide précise que c’est un travail effectué par les femmes en raison de son aspect routinier. Je fronce un peu les sourcils mais je n’ajoute rien.

À regarder les femmes travailler, je me dis que les mouvements répétitifs doivent quand même laisser des traces sur le corps, surtout quand on voit la quantité impressionnante de feuilles qui sont fabriquées chaque jour! Une famille vit en partie des revenus de ce petit commerce.

Au deuxième arrêt, nous rencontrons une femme qui opère un commerce de bananes séchées. Les petites bananes sont pelées et tranchées dans le sens de la longueur puis étendues sur un grand plateau métallique qui sera placé au soleil pour le séchage. Les tranches de fruits séchés sont ensuite grillées et leur goût devient un peu plus sucré.

Cette famille exploite aussi une rizière et vit dans une maison traditionnelle de bois. Les habitants dorment à l’étage supérieur alors que le rez- de-chaussée demeure sur la terre battue. Nous y retrouvons la cuisine, une table pour les repas, un hamac. Cet espace sert aussi d’entreposage pour les outils et la moto. Il y fait plus frais qu’à l’étage et la famille y passe une grande partie de son temps. Pourquoi les chambres sont-elles à l’étage? En partie pour se protéger des animaux sauvages. Les serpents sont venimeux et les scorpions aussi.

Encore une fois Robert fait rire autour de lui avec son chapeau de père Noël!

Notre hôtesse accepte la prise de photo avec Robert ainsi accoutré mais avec un sourire en coin. Les enfants le regardent avec les yeux ronds…Noël n’est pas une fête connue de tous les Cambodgiens. Ils ne la fêtent pas, même si des décorations de Noël sont visibles partout en ville. C’est pour les touristes. Et pour les quelques expatriés qui vivent au Cambodge.

Nous continuons notre route vers la distillerie de vin de riz. Le travail est terminé pour la journée mais le propriétaire vient quand même nous rencontrer pour  expliquer le processus de fabrication de son alcool. Il veut bien nous montrer l’ensemble des ingrédients qu’il utilise mais les quantités restent secrètes, de même qu’un ingrédient mystérieux qui ferait toute la différence selon lui. Il invite le père Noël à goûter au produit fini, bien sûr!

Nous arrivons près d’une fabrique qui produit une pâte de poisson, l’odeur ne trompe pas et notre guide annonce en riant que cette visite n’a pas besoin de présentation. J’ai beaucoup de respect pour tous ces travailleurs qui gagnent leur vie en travaillant dans cette petite entreprise. L’odeur est difficile à supporter et les conditions d’hygiène déplorables. Malgré tout, nous avons été reçus par des salutations bien senties et de grands sourires. À la fin, personne de notre groupe  n’est fâché de se remettre en route! Même le père Noël! Pourtant il adore les marchés de poisson, vous le savez bien…

La ballade en vélo se poursuit dans les rires et la bonne humeur. Mon amoureux attire partout l’attention avec son chapeau de père Noël et les rires fusent sur notre passage. Les motos ralentissent pour le saluer. Personne ne peut lui résister, son grand sourire heureux a son charme et tout le monde le salue. Quel beau Noël pour nous!

Nous arrêtons chez une famille qui fabrique des nouilles de riz de façon artisanale. La production est aussi terminée pour la journée mais tout le processus nous est expliqué et nous goûtons à une soupe préparée à notre intention avec des nouilles de riz fraîches, attablés au bord de la route.

Nous arrêtons finalement à l’endroit où nous devrions déguster des gâteaux de riz. Nous sommes trop tard. Là aussi c’est terminé. Nous avons mis trop de temps pour notre tournée et la noirceur commence à s’installer. Je demande à notre guide d’appeler un tuk tuk, je suis fatiguée. Pas en raison de la randonnée, elle est facile. Plutôt en raison de la peur qui ne m’a jamais quittée. Toute mon énergie a été concentrée à contrôler mon vélo et je ne me suis pas sentie en sécurité sauf dans les sentiers que nous avons empruntés à l’occasion. D’autant plus que j’ai chuté lors d’un arrêt. Une chute sans conséquence, sauf quelques égratignures et peut-être quelques bleus, mais qui illustre bien mon manque d’habileté. Il fait de plus en plus noir et je sais qu’il est plus sage pour moi de déclarer forfait. Ça va, je m’assume. C’est donc en tuk tuk avec mon vélo que je termine la randonnée alors que les autres nous suivent dans un sprint final.

Est-ce que je recommande cette visite? Sans aucun doute. Le matin de préférence afin que tous les commerces visités soient en opération. Pour la ballade en vélo à travers les villages, les rencontres avec les gens, pour la belle campagne. Robert, et  son sourire ne trompent pas. C’est une journée réussie. Quant à moi, je me remettrai au vélo dès la prochaine occasion. Soyez-en assurés!

Les temples d’Angkor, complètement séduits

Nous prenons un congé des temples pour visiter le Musée national d’Angkor. Une belle balade de 20 minutes à pied à partir de notre hôtel, en longeant une rivière. Le soleil nous accompagne, une brise légère souffle doucement. Tout va bien!

Un musée bien fait, où les informations nous aident à mieux comprendre les civilisations anciennes d’Angkor. Tout ce que nous avons visité depuis notre arrivée fait encore plus de sens. Les explications sont claires et les pièces inspirantes. L’évolution de l’art Khmer et de ses influences du IXe siècle au XIVe,  c’est passionnant!  Nous apprécions notre visite dans cet endroit calme et reposant.

Le seul bémol de la visite? Un groupe de touristes et leur guide,  certainement débarqués d’un immense autobus. Ils sont bruyants, leur guide parle très fort et ils sont envahissants. Les gardiens ne disent rien…les autres visiteurs du musée les regardent d’un air découragé. Heureusement leur présence ne dure pas longtemps, un guide leur fait traverser les salles d’un pas rapide et ne leur donne des explications que pour les pièces les plus importantes. Le calme revient aussi soudainement qu’il nous avait quitté et la fin de la visite se passe bien.

Nous profitons du reste de la journée pour marcher dans Siem Reap et nous reposer un peu. Nous avons loué une chambre dans un hotel bien tenu, situé dans une petite ruelle à l’écart du brouhaha du marché et de l’immense bazaar bondé de restaurants et de boutiques de souvenirs. Nous y sommes très bien. La nourriture Khmer est savoureuse, goûteuse et il est possible de choisir des plats végétariens avec de beaux légumes frais.

Comme cette partie de Siem Reap est très touristique, nous avons droit à des offres de consommation de toutes les sortes. Difficile de marcher dans la rue sans que les chauffeurs de tuk tuk, stationnés aux endroits stratégiques, nous crient: « Hello! Hello! Tuk tuk sir? Madam! You want a tuk tuk? Hello! Hello! Hello! » Ou si nous traversons les boutiques du marché: « Madam, you want something Madam? Hello! Madam! » Ils veulent vendre et feront tout pour cela, c’est leur gagne pain. Nous sommes devenus leur moyen de survie. Si nous ralentissons pour admirer une pièce un peu spéciale, les incitations augmentent en intensité… Il nous arrive chacun notre tour de trouver cela un peu difficile mais nous finissons toujours par en rire.

Aussitôt que nous entrons dans la ruelle conduisant à notre hôtel, le silence revient…jusqu’au lendemain matin où le réceptionniste m’accueille alors que je descends encore l’escalier. « Good morning Madam. Did you sleep well? How was your night? Going for breakfast now? Are you eating next door? You can eat  somewhere else if you want to, no problem! Where are you going today? Where is your husband? » Une vrai usine à questions! Et je l’entends recommencer avec Robert qui suit pas très loin derrière moi! Heureusement, les autres membres du personnel sont plus discrets.

Au troisième jour de la visite des temples d’Angkor, monsieur Kong, notre chauffeur de tuk tuk se présente avec un épais blouson avec un capuchon. Il fait frais et nous avons une heure trente de trajet devant nous. Nous emportons de quoi nous couvrir, la première fois depuis Sapa. Le temps légèrement plus frais se continue depuis quelques jours. Les visites sont assez confortables malgré la chaleur qui s’installe rapidement au cours de la journée. Mais en tuk tuk, le vent est un peu froid et c’est avec nos manteaux que nous débuterons la visite ce matin. Tout au long de la route, de grandes rizières et les étangs de lotus alternent avec de petits bourgs plutôt pauvres et désordonnés. Nous passons de paysages bucoliques à la dure réalité d’un pays où une grande partie de la population est plus pauvre que pauvre. Mais partout, les gens s’affairent sous le soleil qui se réchauffe peu à peu.

Le temple Banteay Srei vaut amplement le détour. C’est le site le plus ancien de ceux que nous avons visités. Je suis heureuse de le découvrir car ce que nous avons lu à son sujet la veille au musée a éveillé ma curiosité. La succession de rois et les influences des artisans, venus de pays avoisinants, ont grandement inspiré les différents styles de construction d’Angkor mais aussi les sculptures et les décorations. Dans toute cette évolution, malgré qu’il soit très ancien,  Banteay Srei propose un style savamment ciselé, tout en subtilités et en détails.

 

Une surprise nous attend à Bantay Srei! Malgré l’éloignement du site, nous croisons un nombre important de groupes de touristes. Et puisque le temple est tout petit, nous sommes entassés les uns sur les autres et il est un peu difficile de rester en place pour observer les détails ou même pour prendre des photos.

 

Je décide donc de lâcher prise, d’essayer de savourer la visite et même de rire de la situation avec un autre couple de touristes qui se sont fait bousculer eux aussi. Mais malgré tout cela, la visite vaut la peine!

 

Notre randonnée à la campagne prévoit un autre arrêt, l’escalade d’une montagne où nous pourrons admirer des belles chutes. Il semblerait que les Cambodgiens aiment bien s’y relaxer. En discutant pendant notre repas du midi, nous décidons plûtot de nous entendre avec monsieur Kong, notre chauffeur, pour retourner au Bayon pour l’admirer de nouveau et au Ta Promh pour terminer notre visite de la veille. Notre visite au musée nous a fait voir les styles de construction avec un autre œil. Nous voulons aussi ressentir encore une fois le charme de nos temples préférés. Nous repartons en fin d’après-midi, rassasiés de nos visites et prêts pour une bonne douche!

Les temples d’Angkor nous ont complètement séduits…

 

Les temples d’Angkor, absolument émerveillés

Le circuit de la deuxième journée aux temples d’Angkor propose la découverte de temples plus connus et plus imposants que ceux de la veille. La tournée commence donc par le célèbre Angkor Wat, un chef d’œuvre de l’architecture Khmer.

Nous apercevons de loin les cinq tours qui coiffent Angkor Wat et en approchant, nous réalisons à quel point elles sont imposantes. Pas étonnant qu’elles soient devenues l’emblème du Cambodge et qu’elles apparaissent sur le drapeau national!

Cet immense temple montagne, au départ hindou puis bouddhiste, est dédié tout d’abord à Vishnu. Le centre du Wat est conçu pour représenter le mont Meru et loge des lieux saints à son sommet. Nous y parvenons par un escalier assez abrupt dont l’accès est contrôlé par des gardiens. Un nombre limité de personnes sont admises à la fois et il faut attendre que d’autres touristes redescendent. Lorsque notre tour arrive, notre habillement est vérifié, nos épaules et nos genoux doivent être couverts pour accéder au sanctuaire. Nous pouvons enfin gravir les marches, notre laisser-passer autour du cou. Tout est paisible en haut et porte au recueillement. Du haut des remparts qui ceinturent le sanctuaire, il est possible d’admirer les environs et les sommets des autres constructions qui surgissent de la forêt au-delà des douves d’Angkor Wat. Une brise légère adoucit les effets du soleil qui commence à chauffer. Le regard de Robert croise le mien…nous sommes privilégiés.

La partie centrale d’Angkor Wat est entourée de grandes galeries rectangulaires. L’une d’entre elles nous impressionne plus particulièrement par ses bas-reliefs qui recouvrent presque tous ses murs, illustrant le Râmâyana et le barattage de la mer de lait, un épisode de la création du monde.  Le travail est d’une telle finesse et fait d’Angkor Wat un véritable bijou archéologique!

Régulièrement Robert nous fait la lecture, toujours assis un peu en retrait. Nous apprenons un peu plus sur la civilisation Khmer et sur les grands rois qui ont construit Angkor. La magie est au rendez-vous.

Mais notre réel coup de coeur nous prend par surprise. En entrant au Bayon, situé exactement au centre de la grande cité Angkor Thom, nous admirons longuement de magnifiques bas-reliefs avant d’entrer dans le labyrinthe de galeries du rez-de-chaussée.

Mais rien ne nous prépare à la vue qui nous attend en grimpant les escaliers qui mènent à l’étage.

Le deuxième étage de la structure est littéralement coiffé d’immenses têtes avec quatre visages qui regardent toutes vers un point cardinal différent. Une nouvelle tête surgit à chaque détour! Elles se découpent fièrement sur le ciel bleu, entourant un troisième étage d’une forme sphérique. Lors de la construction du Bayon, il y en aurait eu 54 en tout, comme le nombre de provinces au Cambodge. À travers les années, cette structure a suscité la curiosité de bien des archéologues. Quant à moi, elle séduit mon imaginaire!

Nous continuons notre périple sous le soleil d’après-midi pour nous retrouver derrière un immense temple que nous venons d’escalader, le Baphuon. Il m’a fallu tout mon courage pour redescendre l’escalier abrupt et mes genoux tremblent encore. Les indications nous amènent en arrière de l’imposante structure vers des panneaux d’information protégés par un toit de palme. Un bouddha devrait attirer notre attention même s’il est endommagé. Rien en vue. Désolés de l’avoir manqué, nous refaisons nos pas en pensée…regardons autour des panneaux…avançons un peu plus loin…rien! Je me retourne vers le Baphuon en me disant que je n’ai pas le courage de remonter. Il est là! Ce majestueux Bouddha mesure 60 mètres et occupe tout le mur arrière du temple! Il est immense. Pas étonnant que l’étage supérieur du temple soit presque inexistant, ils en ont repris les pierres pour construire le Bouddha couché!

Le temple appelé Ta Promh, situé lui aussi dans la cité Angkor Thom, se classe lui aussi au palmarès de nos coups de coeur. Cet endroit a été laissé à lui-même pendant plusieurs années et la nature a repris ses droits. Quel spectacle! De grands fromagers ont élu domicile le long des murs et autour des entrées. Une vrai cité perdue que nous avons l’impression de découvrir!

Avec ses multiples cours et ses galeries, elle ressemble à un immense labyrinthe à l’intérieur duquel il fait bon se perdre.

Si le Bayon a suscité bien des questionnements de la part des archéologues en raison du style de sa construction, Ta Promh quant à lui fait rêver. La lumière est parfaite en cette fin d’après-midi. Nous quittons les lieux à regret, la fin des visites étant arrivée. Mais il  nous reste encore une journée de visite, nous reviendrons!

Nous repartons vers Siem Reap en compagnie de notre chauffeur de tuk tuk, juste le temps de prendre quelques photos supplémentaires et de nous dire que nous avons passé une belle journée.